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Saturday, December 30, 2006

De nouveau « Les sans-culottes » !

Le macadam brûle encore une fois à Port-au-Prince et cette fois il s’agit d’un lever de bouclier contre la présence onusienne au pays. Une initiative partie de l’université gardienne du drapeau, ergo de la souveraineté nationale. Une manifestation de la conscience jeune qui fait dire à certains que " Ayiti pap mouri ".

Cependant, chaque fois que la fumée noire des pneus enveloppe la ville, on ne sait jamais ce qui s’y dissimule. Depuis 1946, les intenses moments de mobilisation, les jubilations révolutionnaires ont toujours été suivi de période de désillusions et de gueule de bois. Chez nous la mobilisation prend souvent des allures de " fièvre convulsive ", elle est soudaine, frénétique, intermittente et retombe après avoir été joyeusement manipulée par des secteurs politique plus madrés.

C’était ainsi en 46,86, la récente conjoncture de la transition ne nous ferait guère mentir !

Aussi, si c’est tonique de voir des jeunes marcher unis en cette année Dessalines ; si l’on est honteux et mécontent comme eux de notre perte de souveraineté, j’ai envie de dire que ce n’est pas la faute aux autres comme d’habitude… mais à nos traditionnels jeux de massacre.

Que feraient les voisins chez nous, si nous n’avions pas crié au feu. Comme toujours dans ces cas, tout le monde est Ponce Pilate, personne n’aime le rôle de Judas. C’est tout simplement, dans le but d’attendre, au tournant, pour " surfer " sur la crête de la nouvelle mobilisation, on ne sait jamais ou elle peut mener. N’est-ce pas ?

Seulement, il faudra faire attention et ne pas gaspiller une fois de plus toute cette belle énergie à force de vouloir aller trop vite. Je veux dire qu’il faille tenir compte des leçons de l’histoire pour ne pas recommencer les mêmes horreurs, pardon, erreurs !

Et puis, à quoi bon demander aujourd’hui le départ de l’ONU pour qu’elle revienne trois mois plus tard après une " nuit des longs couteaux ". Une fois que l’équilibre des forces sera rompu, ceux qui détiennent une puissance de feu supérieure à une police en demi teinte, affaiblie encore plus par des frasques judiciaires, s’assureront la maîtrise des évènements et ce sera encore isolement, embargo ou mise sous tutelle officielle. C’est le propre de l’Université de se mobiliser pour des idéaux nobles que nous tous nous partageons, mais le courage n’est pas toujours une vertu en politique, s’il ne s’accompagne d’une vision à court et à moyen terme. C’est pour cela, que je souscris à l’opinion d’un collègue pour la mise en place d’un calendrier raisonnable de retrait de la dite force.

Nous devrions d’abord répondre à quelques questions essentielles avant tout mouvement précipité : Sommes nous prêt à cohabiter pacifiquement avec toutes les forces politiques anciennes et nouvelles qui pointent sur le terrain ? Sommes-nous toujours fascinés par le sang qui coule à Bagdad au point de vouloir le reproduire chez nous sur une base trimestrielle ? Avons-nous déja mis en place, la nouvelle force nationale de défense et réfléchi à comment empêcher qu’elle soit détournée dès les fonds baptismaux par des parrainages trop empressés d’ailleurs et d’ici ? Avons-nous entamé le débat national et la définition de l’agenda qui nous permettra de sortir de l’humanitaire ?

C’est la responsabilité des politiques d’expliquer leur démarche et de montrer le bout du tunnel. C’est de la responsabilité de ceux qui viennent nous aider de le faire avec plus de résultats. Cet ouragan qui germe derrière l’écran de fumée de nos manifs est aussi le produit d’une certaine frustration, surtout quand certains s’en vont raconter chez les voisins que nous sommes en faillite. Ce n’est pas nous aider que de remuer le couteau dans la plaie. Quoiqu’il en soit par delà les déclarations émotionnelles ou calculées des uns et des autres, les slogans de notre indépendance : libète ou lanmò, koupe tèt boule kay, ne peuvent plus être mélangés à toutes les sauces idéologiques et politiques...cela aussi est de la profanation.

A quelques semaines d’élections annoncées et, des fêtes de fin d’année, dont on espère qu’elles permettront pour une fois, un début de reprise pour le commerce et l’industie du spectacle, je doute qu’il faille se mobiliser dans tous les sens comme un peuple de « fourmis folles », en tirant chacun de notre côté le testament de nos ancêtres au risque de le réduire en miettes.

Roody Edmé

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