Le monde entier a pu voir sur le petit écran, les manifestations de colère des foules islamistes en furie contre les caricatures jugées injurieuses pour le Prophète Mohamed diffusées dans la presse danoise. La violence de ces manifestations témoigne de la profonde offense ressentie par ces musulmans face à des caricatures qui, en Occident, participent d’une culture de la dérision et même, une telle pratique, est considérée comme une manifestation de la sacro-sainte liberté d’expression des médias occidentaux.
Et alors ? Quel sens accordé à tous ces bruits et fureurs qui secouent le monde arabo- musulman ? Il se trouve que l’humanité est assise sur une poudrière, celle d’un Moyen-Orient polarisé par la montée de revendications ethno-religieuses, autour d’un islamisme de plus en plus triomphant dans les esprits.
Un islamisme qui s’est engouffré dans le vide laissé par le déclin du nationalisme arabe jadis incarné par un Gamal Abdel Nasser ou même le vieux roi Faysal d’Arabie Saoudite, tous les deux décédés. Cet islamisme pur et dur qui descend en droite ligne du pouvoir religieux totalitaire de Komeyni s’est propagé au Moyen-Orient à la fois comme une réaction contre des régimes arabes dictatoriaux et corrompus soutenus par l’Occident, mais aussi contre l’occupation israélienne de la Palestine. On peut dire qu’il trouve son ferment dans une certaine arrogance d’une pensée occidentale et totalisante, rendue unique par les puissants moyens d’une technologie aussi attrayante qu’agressive.
D’où le besoin dans le monde arabe de répondre à CNN, voix et images de l’Amérique dans le monde, par des chaînes de télévisions comme Al-Jazyra ou Al-Arabia qui présenteraient les vues du monde arabe.
Ce sont donc à n’en pas douter des manifestations d’une résistance culturelle et politique à un certain impérialisme des Etats-Unis, leader de l’Occident. Mais attention à tout schéma réducteur. L’islam politique et radical s’enracine aussi dans les fracturations et la pauvreté des masses arabes et, il faut le dire, une certaine timidité de l’islam profond et modéré qui n’ose pas assez confronter le discours extrémiste d’imams radiaux qui, prétendent détenir le monopole des interprétations du coran, comme le font certains fondamentalistes chrétiens pour la bible. Or justement, ce n’était pas le moment pour une telle provocation dans la presse occidentale, provocation largement relayée sur l’internet. Si l’on adhère au principe de la liberté d’expression, elle implique aussi très certainement, celui de la responsabilité. C’est un vieux débat qui n’a pas fini de faire couler de l’encre et malheureusement du sang dans ce cas précis.
Il y a aussi, il faut l’avouer, quelque chose d’inquiétant dans cette fièvre fanatique qui secoue le Proche-Orient et, le « patriotisme nucléaire » iranien est à prendre avec des pincettes.
Le monde doit trouver de nouvelles formes de cohabitation, non plus des idéologies, mais des valeurs culturelles et religieuses. Le président Chirac a récemment évoqué la "force de frappe" nucléaire française dans une allusion à peine voilée aux crispations apparues dans les relations entre l’Iran et la communauté internationale. On parle aussi d’une éventuelle initiative militaire israélienne dans la même direction. Si le discours sulfureux du chef d’État iranien Amadjinedad mérite d’être condamné, la communauté internationale doit veiller à tout effet de contagion dans l’escalade. Quoiqu’il en soit comme l’estime un confrère de la presse brésilienne, le mérite de ces tristes évènements a été au moins de montrer que la liberté d’expression, pilier des droits fondamentaux n’est pas une œuvre toute faite, achevée et sacrée. Nous devons continuer à la mériter.
Roody Edme
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