Ailleurs vu d'ici

Global Voices en Français

Tuesday, October 04, 2005

Le Monde :

CHRONIQE D’UN CHANGEMENT ANNONCE?

Il flotte sur l’Amérique et le monde, un air de fronde idéologique. Tout se passe comme si les certitudes acquises autour de la prétendue débâcle des théories de Keynes étaient fortement secouées par les terribles vents de Katrina et de Rita. En dépit de la course échevelée du libéralisme pure laine, il semble poindre à l’horizon une certaine renaissance culturelle, annonçant un nouveau printemps des idées. On commence à s’interroger dans certains cercles si le "moins d’Etat" n’est pas aussi néfaste que "le trop d’Etat" – tout est donc dans la nuance. Une machine économique aussi productive et dynamique que celle des États-Unis ou de l’Allemagne fabrique aussi des exclus et des poches grandissantes de pauvreté. Beaucoup ne semble plus croire à une "main invisible" qui finirait par tout arranger, et aux dires d’un célèbre économiste, "la main est d’autant plus invisible qu’elle n’existe pas". Ergo, la question du rôle de l’État dans une économie de marché se repose avec acuité, puisque à la Nouvelle Orléans, les faiblesses de la puissance publique fédérale ont failli "engloutir" tout l’État.
Les Etats-Unis en cette fin de septembre, prennent une allure de mobilisation pour ou contre la guerre en Irak ou pour ou contre un État plus présent, plus proche du citoyen. Un débat qui risque de remettre en selle le parti démocrate qui a dans son palmarès le New Deal, lequel devait donner un second souffle à l’économie américaine, après un certain jeudi noir d’octobre 1929.
Ce week-end, on a vu défiler sur le petit écran, une marche assez colorée de pacifistes de tout crin, véritable remake du film "Hair" de Milos Forman. On a semblé revenir, un moment, aux belles années du pacifisme américain, à l’époque du "Peace and Love". Toute une génération était en marche qui préférait la chaleur des concerts et des feux de camp à celle du napalm dévorant les rizières au delà du 17ème parallèle. C’était l’époque où on préférait les chansons de Bob Dylan à la théorie des dominos du Dr Kissinger, un certain Bill Clinton allait frénétiquement de son saxo, comme pour couvrir le vrombissement des bombardiers B-52 au-dessus de Hanoï et de Haiphong.
Il est de bon ton aujourd’hui que le citoyen moyen de la plus grande puissance du monde demande des comptes sur la politique étrangère, par exemple : qu’il essaie de comprendre le pourquoi des milliards pour la guerre dans le golfe persique et si peu pour entretenir les digues de la Nouvelle Orléans. Il apprendra peut être que toutes les missions assignées



aux "boys" n’ont pas l’aura de la descente sur Omaha Beach ou ne rappellent pas toutes l’épopée glorieuse de "D Day" sur les plages de Normandie – ou même osons le dire, la "légitime défense" de l’opération anti-Taliban, dans la foulée de l’après 11 septembre.
Un récent sondage a montré que les américains ne sont pas très contents de leur image à l’étranger, ce sondage est révélateur d’une évolution dans la conscience politique de l’américain du Middle class qui commencerait à ne plus regarder le monde dans les lunettes manichéennes de la grande presse. Au sud de l’hémisphère, nous ne pouvons qu’applaudir à cette tendance, si elle se maintient, la plus grande démocratie du monde a besoin de soigner son image.
En France aussi, le débat est lancé sur une réforme de la Vème république. Aux éditions Odile Jacob vient de paraître, une collection de dix volumes autour de la constitution de la Sixième République, à venir peut être.
Quant à l’Allemagne dont le projet social parait coincé entre un social pragmatisme et une poussée libérale, la conjoncture politique a les couleurs du temps, plutôt boueuse.
A Port-au-Prince, la rentrée littéraire est politique. Hérold Jean François et Jean Robert Simonise rêvent d’un pays sur "papier glacé", une manière pour ces auteurs d’irriguer le terrain politique haïtien, connu pour sa proverbiale infertilité. Les sociétés civiles bougent un peu partout sur la planète, alarmées par les crises qui menacent de tout emporter. Et quand dans la froide armure de la pensée unique, semble bailler une ouverture d’espoir, on a envie de dire comme dans les jeux de carpe et d’épée : Touché!


Roody Edmé

0 Comments:

Post a Comment

<< Home