Ailleurs vu d'ici

Global Voices en Français

Monday, October 17, 2005

L’odyssé du désert !

Sept cent cinquante kilomètres de marche harassante dans le désert marocain, sous un soleil de plomb, suant toutes les gouttes de leurs corps, dans une pénible ascension vers le Nord : C’est la cohorte des exclus de la mondialisation, en marche, vers la « porte étroite » du paradis européen.
Comme souvent, cela se termine par leur capture, la mine défaite, tenus en respect par les gardes frontalières, ils sont filmés, des visages hagards, tourmentés par les misères d’une traversée périlleuse apparaissent sur les écrans de télévision !
Chaque année, des milliers d’entre eux tentent de forcer les limes européennes, les passeurs et autres trafiquants illicites réalisent des milliards de dollars de ce commerce humain des temps modernes.
Nouveaux « barbares » du 21ème siècle qui souhaitent conquérir leur part d’occident, ils sont de loin plus modestes que les hommes de Cortès ou de Christophe Colomb, premiers agents de la mondialisation. Ces hordes de gueux venus du Sud viennent simplement vendre leur force de travail sur le marché européen. Mais comme « l’histoire ne repasse pas les plats », leur aventure sombre souvent avec leurs frêles esquifs. Dans une sorte de remontée des eaux, elles envahissent les côtes méditerranéennes, interface de l’Europe avec l’Afrique du Nord. A la recherche d’un mieux être, un instinct de survie les pousse à quereller la mort, à escalader les murailles et les barrières dressées pour les contenir.
Beaucoup se sont blessés pendant la traversée, ils n’avaient pas fini d’être soignés que les autorités espagnoles décidèrent de les retourner dans leurs pays d’origine, au grand dam des organisations humanitaires.
Un autre groupe a échoué sur une petite île non loin des côtes italiennes, ceux-la aussi ont été pris et les traitements subis si dégradants qu’une certaine conscience européenne a exprimé dans les journaux, sa nausée ! Etrange comme les fantômes de l’histoire viennent nous hanter et, nous rappeler les terribles moments où la volonté de puissance, le sentiment de supériorité ont rabaissé notre humaine condition et transformé certains hommes en chacals. Ces exactions sur des illégaux ont eu lieu en Italie, le pays de Primo Lévi, l’homme qui nous a laissé un témoignage poignant sur les camps concentration, aux temps obscurs de la peste brune. Et nous viennent en échos, ces paroles de l’écrivain chimiste : « considérez si c’est un homme… celui qui peine dans la boue, qui se bat pour quignon de pain, qui meurt pour un oui pour un non…n’oubliez pas que cela fut » Un autre écrivain Jean Orizet, jetant un regard sur le siècle passé, s’adresse aux générations présentes en s’interrogeant : « Pourquoi tant de sauvagerie dans un monde aussi policé ? Pourquoi ces misères criantes dans un monde aussi équipé ?> Il y a donc quelque chose de pourri au royaume de ce monde post-industriel qui mérite d’être adressé, sinon ce sera comme dans le film Equilibrium, du réalisateur Kurt Wimmer, la fin des émotions et la quête de l’homme sans âme. Pourtant, nous sommes arrivés à des progrès scientifiques sans commune mesure dans l’histoire de l’humanité et un économiste non hétérodoxe comme Joseph Stiglitz affirme « le défi n’est pas d’inverser le processus de mondialisation, mais de permettre à davantage de pays pauvres de s’intégrer à l’économie mondiale, de manière à réduire, et non à augmenter, les inégalités ».
La Banque Mondiale elle aussi, commence à s’y mettre et recommande « d’accorder aux pays en développement une plus grande latitude pour mettre en place des institutions qui leurs soient profitables, et d’éviter, dans le cadre d’accords commerciaux, de leur imposer un modèle institutionnel unique ». Un combat pour une mondialisation à visage humain, fait donc son chemin. Et c’est de bonne guerre, car tout près de nous, la modernité du mal c’est : « être haïtien en République Dominicaine ». On a appris qu’un officiel de la présidence dominicaine s’est fait tabasser parce que ressemblant à un haïtien. Parvenu à ce stade, on ose espérer que les autorités dominicaines mettront fin à cette dérive, pour avoir vérifié dans la « chair » de l’un des leurs, « qu’autrui est un autre moi-même ». En attendant, ça pique encore sous les tropiques et sur les rivages de la méditerranée.

0 Comments:

Post a Comment

<< Home